Annecy honore, avec son grand évêque, sainte
Jeanne de Chantal, qui demeure la plus proche de lui. Elle nommait François de
Sales son “bienheureux père” car il fut, dans une admirable amitié, l’interprète
respectueux et le guide éclairé de sa conscience. Nous aimons l’évoquer parce
que son itinéraire a été extraordinairement riche. Jeanne de Chantal a vécu, en
suivant avec ferveur les simples chemins de la foi, les étapes de la vie d’une
femme qui rayonne de sagesse humaine et spirituelle.
Jeune fille, épouse, mère, veuve, en peu d’années
elle a connu la joie et l’épreuve, elle a mûri par le don d’elle-même. Dans
l’épanouissement d’un couple qui s’aime et de la maternité, elle a développé sa
foi et mis en pratique la charité en soignant les malades et en apportant aux
pauvres une aide respectueuse. Meurtrie par la mort de son époux, la souffrance
l’a marquée encore de bien des manières. Elle a su la difficulté du pardon,
l’inquiétude pour l’avenir de ses enfants. D’autres deuils l’ont
douloureusement frappée. Et même, il ne faut pas l’oublier, à toutes les étapes
de sa vie, Jeanne de Chantal s’est vue ébranlée dans sa foi. Le doute et
l’obscurité l’ont saisie au moment de tracer sa voie, dans une réelle
souffrance. La sainteté est traversée de ces combats.
Au long de cette route, elle qui aimait chanter
les Psaumes, elle a pu méditer ces paroles:
“Je cherche le Seigneur, il me répond : / de
toutes mes frayeurs, il me délivre . . . / Goûtez et voyez, le Seigneur est
bon! / Heureux qui trouve en lui son refuge!” (Ps 33, 5. 9).
Oui, elle affirmera sa résolution de se donner
toute entière au Seigneur “dans une toute simple confiance”. Elle poursuivra
son chemin en s’appuyant sur le pur amour de Dieu. Des frayeurs, elle est
délivrée ; en Dieu, elle trouve sa paix.
8. Dans le cours de sa vie, heureuse puis
blessée, elle reçoit le message de salut et devient une vraie servante de
l’Alliance. Et voici que Jeanne prend le chemin de ces montagnes, dans l’esprit
même de la Vierge de l’Annonciation se rendant auprès Élisabeth : elle est
toute soumise à la Parole du salut, toute adorante du Verbe incarné, elle rend
grâce pour les “merveilles de Dieu”, elle est prompte à exercer une charité
humble et quotidienne. Elle est prête à fonder avec François de Sales la
Visitation.
Nous rendons grâce aujourd’hui pour l’action
complémentaire de ces deux saints, pour l’admirable foyer de contemplation
qu’est la Visitation, modelé grâce à leur riche amitié spirituelle. Mère commune,
Jeanne de Chantal établit la Visitation avec douceur et avec sûreté. Elle
“enracine l’union” dans l’amour mutuel, l’humilité, la simplicité, la pauvreté.
Ayant “tout remis à Dieu”, “revêtue de Notre Seigneur crucifié”, elle est une
incomparable maîtresse d’oraison, amenant ses Sœurs et bien d’autres personnes
à connaître comme elle-même “une grande liberté intérieure, . . . une sorte
d’oraison toute cordiale et intime”.. (cf. Mémoire de la Mère de
Chaugy)